Publié par

Barthes disait que La littérature ne permettait pas de marcher, mais elle permettait de respirer. Ce roman graphique en est la parfaite illustration : une parenthèse enchantée dont on respire la douceur à pleins poumons.

Soyons honnêtes, le scénario n’a rien d’original : deux femmes que tout oppose, séparées par un océan, entrent en contact via internet. La première de couverture ne laisse que peu de doute d’ailleurs sur l’histoire.

Coline, 22 ans, vit chez ses grands-parents, à la campagne proche de Périgueux. Elle a dû se résoudre à abandonner ses études, souffrant de troubles de l’anxiété et de phobie scolaire. Elle tente tant bien que mal de trouver une place dans la course du monde.

Elle s’accroche pourtant à son rêve de devenir illustratrice, malgré la pression familiale : illustratrice n’est pas un métier « sérieux ».

Elle contacte Marley après avoir découvert sur la toile ses photographies, qui l’inspirent beaucoup dans son travail. Marley, 28 ans, vit au Québec. Elle a abandonné sa passion pour la photo et exerce un job alimentaire dans un restaurant. Elle est en couple, sans grande passion, avec un homme pour qui la réussite sociale est un impératif : « le bonheur, c’est d’en avoir plein les armoires » comme dit la chanson. Marley s’enferme dans ce quotidien sans saveur, auprès de son petit ami toxique qui ne cesse de la rabaisser.

Peu à peu, des liens d’amitié se tissent entre les deux jeunes femmes. Les messages dépassent le cadre de la collaboration artistique pour devenir plus personnels. Plus « instantanés » aussi, avec l’utilisation des textos, malgré le décalage horaire.

Profitant d’un séjour dans sa famille en France, Marley rend visite à Coline. Passer du virtuel au réel ne fait que confirmer le sentiment amoureux qui couvait entre elles.

Elles vont devoir oser… oser dépasser ses peurs pour Coline, oser quitter le confort d’une vie sans saveur mais confortable pour Marley.

La grande originalité de ce roman tient dans sa construction à quatre mains. Les deux dessinatrices excellent chacune dans leur style.

L’histoire est écrite en miroir. Manon Desveaux dessine Coline sur la page de gauche, en noir et blanc. Ce choix vient souligner le caractère taciturne et introverti du personnage.

Lou Lubie croque la pétillante Marley sur la page de droite, en couleur.

Graphiquement, c’est une belle réussite. Les traits semblent se répondre quand ils ne se complètent pas.

Bien que peu originale (i.e la rencontre de deux personnes que tout oppose) l ’histoire est touchante, moderne (les rencontres 2.0). On regrettera les sujets à peine effleurés (comme le coming out et les regards étrangers sur cet amour saphique). Mais peu importe : l’histoire sensible vous emportera.

Une belle réussite.

S..

LA FILLE DANS L’ÉCRAN, de Lou Lubie et Manon Desveaux
LA FILLE DANS L’ÉCRAN, de Lou Lubie et Manon Desveaux

#BD

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article