Publié par

Au début des années 80, la communauté Gay subit une hécatombe avec l’apparition d’une nouvelle maladie, un mal inconnu qui prive ceux qui en sont atteints de toutes défenses immunitaires. On parle alors de « cancer gay », de maladie des 4H (héroïnomanes, homosexuels, hémophiles et Haïtiens) . On traque chez l’autre l’apparition de lésions cutanées portant le nom de sarcome de Kaposi, l’écriture sur la peau d’une fin qui s’annonce tragique.
Adapté de la pièce éponyme de Larry Kramer, ce téléfilm nous transporte au début des années 80, à NYC, alors que le Sida fait son apparition. La communauté scientifique est démunie face à l’ampleur de l’épidémie, quand elle ne s’en désintéresse pas. Face à l’inertie des pouvoirs publics Ned Weeks, un écrivain activiste s’engage avec un groupe amis, aidés d’une médecin, Emma Brookner, pour alerter les politiques, tenter d’obtenir des subventions et une prise en charge des malades. On ne sait que peu de choses alors sur les modes de contamination par le VIH (même ce terme est anachronique ici), mais les premiers travaux d’Emma suggèrent une transmission sexuelle. Les recommandations d’abstinence sont alors bien difficiles à professer auprès d’une communauté qui revendique la liberté sexuelle.
L’association créée par Ned et ses amis, le GMHC (Gay Men's Health Crisis) organise collectes de fond et rassemblements pour venir en aide aux personnes infectées et soutenir les services médicaux. Ned est très impliqué, constatant le sort qui est réservé aux malades : isolement, désintérêt du personnel médical qui craint la contamination, absence de prise en charge décente des morts…
Ned écrit des articles et contacte un journaliste du Times, Felix,  espérant ainsi alerter et obtenir le soutien de l’opinion publique. Une tendre relation amoureuse se noue entre Ned et Felix.
Des tensions apparaissent au sein de l’association, le groupe étant partisan du dialogue avec les responsables politiques s’opposant ainsi à Ned qui n’hésite pas à accuser le gouvernement,  sur les plateaux de télévision par exemple,  d’extermination des Gays (il faut dire que la Maison Blanche semble plus se soucier d’une possible transmission aux hétérosexuel.les qu’au sort de la communauté Gay) ou encore à outer publiquement le maire de NYC.
Cette approche agressive lui vaut d’être exclu du GMHC.
Parallèlement à ces luttes, il y a les histoires d’amour et de deuils, les amis qui sont emportés, les cartons qu’on retire du Rolodex et qui s’empilent dans un tiroir…

Nous avons chroniqué ici Philadelphia, The Dallas Buyers Club et 120 battements par minute, trois films auxquels on pense immanquablement, pour leur traitement de l’homophobie et de l’immobilisme du système de santé face à l’épidémie.
Ce téléfilm au casting cinq étoiles n’a rien à envier à ces références du grand écran. La caméra filme avec pudeur les corps, corps aimants ou corps souffrants, l’émotion est présente tout au long du film, servie par une bande originale délicieusement nostalgique. L’eau déborde souvent des yeux, témoins sans voyeurisme, de ces histoires d’amour et d’amitié, d’espoir et de résignation.
Le film pose aussi la question de l’engagement, des différentes expressions du militantisme : la fin justifie-t-elle les moyens, autrement dit les excès sont-ils parfois nécessaires et justifiés face à l’immobilisme des institutions.
84 millions de personnes ont été infectées par le VIH depuis l’apparition de l’épidémie. Près de la moitié est décédée (chiffres de 2021, observatoire des Nations Unies). La prise en charge des malades a fort heureusement évolué, même si on observe de grandes disparités régionales (en particulier en Afrique). La mortalité liée au SIDA a diminué de 50% depuis 2010.
On doit en partie ces résultats à la mobilisation précoces des associations. Certaines privilégiaient les actions de préventions et d’accompagnement des malades. D’autres, comme ActUp, se voulaient plus contestataires. On a tous en mémoire leurs actions « coups de poings » qui ont sans aucun doute contribué à changer le visage de la lutte.
Larry Kramer est décédé en 2020. Si ses prises de positions ont parfois été critiquées (son côté jusqu’au boutiste, ses actions « sans concession », le fait qu’il n’hésite pas à outer des politiques pour dénoncer l’hypocrisie de ces derniers),  son action pour les droits de la communauté homosexuelle et dans la lutte contre le Sida a été déterminante.Si ses prises de positions ont parfois été critiquées, tous s’accordent à reconnaitre son rôle majeur pour les droits de la communauté homosexuelle et dans la lutte contre le Sida.

S..

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article