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La singularité est à la fois un caractère original ou étrange et ce qui est « propre », ce qui donne à tout être ou chose d’être particulièr.e et spécifique. Fénelon la trouve dangereuse, Jabès , subversive. Baudrillard y voit une manière de résister.
Dans la grande mathématique du monde, aux équations bien difficiles à résoudre parfois, la somme des singularités des êtres est une richesse. Pourtant, certain.e.s s’évertuent à ranger, classer ces singularités dans une hiérarchie des sexes, des âges, des genres, des races, des morphologies, des fortunes…
En 2018, à l’ombre des cyprès d’un jardin avignonnais pendant le festival, je découvrais une magnifique aventure théâtrale fruit d’une écriture collégiale. Professionnel.le.s, amateuristes, jeunes, moins jeunes réuni.e.s  sur les tréteaux, dans un joyeux mélange de pupitres, de feuilles volantes et d’affiches. 
Le festival d’Avignon a toujours été pour moi un lieu d’errances, de ces errances joyeuses où le regard et l’oreille baguenaudent, se posent le temps d’un spectacle, s’ouvrent en grand pour se nourrir de mots et de gestes. 
Chaque année, le jardin Ceccano se transforme en scène ouverte sur l’agora, qui devient par là même partie intégrante du spectacle.
L’engagement de David Bobée n’est plus à démontrer. Metteur en scène très engagé dans la lutte contre toute forme de discrimination, il cofonde en 2015 le collectif Décoloniser les arts, qui œuvre à une plus grande diversité dans le monde du spectacle. C’est à lui qu’est confiée en 2018 la mise en scène d’un spectacle mêlant amateuristes et professionnel.le.s autour d’un corpus littéraire : Genre, corps, territoire, minorités, invisibilisation des femmes… Autant d’épisodes (13 en tout) du feuilleton du festival cette année-là.

Ronan Chéneau a choisi dans ce recueil de fusionner certaines parties de ces épisodes pour nous livrer un corpus dense, sensible et réjouissant. En faisant se rencontrer les points de vue et les approches, en tirant un à un les fils des singularités, Ronan Cheneau tisse un texte puissant qui amène à penser et repenser les normes, ce carcan qui nous empêche de célébrer les singularités en les rangeant dans des boites dont les côtés ressemblent bien souvent aux barreaux d’une prison. Et les barreaux, ce texte les fait voler en éclat.  Il libère pour célébrer la diversité, éclaire, en vulgarisant, les questionnements autour des problématiques de genre et des sexualités. Il rassemble autour de la liberté… liberté d’être et d’aimer. Une liberté qui offre un bien précieux cadeau : la découverte et la (re)connaissance joyeuse de la singularité .

« Rien ne nous interdit d’aimer de chaque folklore un pas de danse » Yasmina Khadra
S..

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