Les pédales et leurs amiEs entre les révolutions, de Larry Mitchell et Ned Asta
« Aux Pédales qui ne cessent de (re)construire les mondes » Adel Tincelin
Il était une fois un conte dont les héroïnes sont pédales, et leurs amiEs femmes fortes, féministes ou reines de jour en habits de nuit.
Un conte comme autant de variations des histoires queer d’une communauté en lutte et en résistance contre la société patriarcale et hétéronormative.
Dans le royaume de Férule, Warren-Et-Sa-Trique impose violence, destruction, et soumission du peuple. Des hommes sans couleur, riches collecteurs d’impôts, vendent des quantités de choses qui finissent par posséder les habitantEs soucieuXses d’acquérir toujours plus de dérisoire. En marge de ce régime dictatorial, les Pédales aux amours chaleureuses forment une communauté alliée aux femmes fortes (les féministes), aux femmes qui aiment les femmes, aux drag-queens (Les Reines), et aux Queer. Une communauté colorée, bruyante et révolutionnaire contestant l’hégémonie capitaliste, patriarcale et hétéronormative. Ensemble, iels bâtissent un idéal de liberté sexuelle, se nourrissent d’Art et de culture en attendant la prochaine révolution.
S’inspirant de son expérience au sein de la communauté queer de Lavander Hill , une des communautés gays et lesbiennes dans les années 70’s du mouvement Retour à la Terre, Larry Mitchell livre ici un objet littéraire inclassable, entre manifeste politique et conte merveilleux, à la prose délicieusement poétique. Initialement, Larry Mitchell destinait sa fable à un lectorat jeune en manque de littérature Gay. Véritable objet de culte dans la communauté Queer états-unienne, le livre n’a pourtant jamais été accepté par les maisons d’édition. Larry Mitchell a dû créer la sienne pour diffuser son œuvre. La sortie en langue française est récente, automne 2023.
Le texte a été « actualisé » : utilisation de l’écriture inclusive, choix de traduire faggots par pédales plutôt que pédés (choix d’un mot de genre féminin pour accentuer la différenciation d’avec les hommes).
Dans ce voyage poétique, les illustrations de Ned Asta, cofondatrice de Lavender Hill, contribuent à l’originalité de l’œuvre. Les volutes abstraites à l’encre noire caressent le texte et font danser les mots. Les portraits fantasmagoriques donnent corps aux acteurs du roman.
Comment un texte écrit dans les années 70’ peut-il à ce point nourrir nos militances contemporaines ? Peut-être tout simplement parce qu’il est très actuel. Parce que nous habitons toustes le royaume de Férule, où même si certaines contrées ont adopté des lois adelphes, il subsistent encore bien des régions où les Pédales et leurs amiEs ont à mener des révolutions.
Ces régions portent les noms de binarité, hétéronormativité, sexisme, patriarcat, capitalisme…
Peut-être aussi, parce que, les Pédales et leurs amiEs que nous sommes, s’accommodent d’habiter Férule, oubliant de colorer le monde gris des hommes de nos révolutions irrévérencieuses.
Laissez-vous emporter par cet ode à la pédalelphité…
S..
Pour compléter la lecture, le documentaire Lavender Hill est disponible sur Viméo :
https://vimeo.com/92450838