"It's a sin", une série anglaise évoquant les années Sida
Qui se soucie du Sida aujourd'hui ? A l'heure où la PrEP (prophylaxie pré-exposition) se diffuse de plus en plus largement, alors que l'accès aux médicaments qui soignent du Sida dans les pays riches a pu faire reculer la pandémie, la psychose et les ravages des années 1990 sont bien derrière nous. Trois décennies plus tard, l'épidémie semble faire partie d'un lointain passé, écho aux heures sombres de la Peste ou de la Grippe espagnole.
C'était pourtant hier.
C'est cette thématique que choisit d'explorer la série anglaise It's a sin, une épopée humaine drôle, pétillante et sombre à la fois. Dans l'Angleterre du début des années 1980, nombre de jeunes gays fuient leur province d'origine, conservatrice et homophobe, pour trouver dans la grande ville (Londres) un havre de paix et de bonheur queer (l'opposition rural/urbain dans le vécu lgbt+ étant un poncif du genre). En l'espèce, quelques-un.e.s de ces jeunes se retrouvent dans une colocation bigarrée, soudée par l'amitié, avec au cœur du dispositif un apprenti acteur et sa grande amie, qui jouera un rôle capital.
Cette jeunesse, que la libération sexuelle des années 70 galvanise encore, est soudain confrontée à d'étranges problèmes de santé. Il s'agit bien sûr, mais on ne le sait pas encore, du VIH.
En sept épisodes, la série balaie une décennie : les interrogations du départ, la cécité de la majorité des gays que la vie n'a pas préparé à limiter leurs appétits sensuels, la prostitution, la réaction brutale des autorités, allant jusqu'à interner d'office sans leur consentement les premiers malades, et bien sûr la dramatique et de plus en plus rapide disparition des amis.
It's a sin confronte cette jeunesse frappée de plein fouet, à l'homophobie de certaines familles, à la honte, à la peur et au rejet, à l'horreur que représente, pour nombre de parents d'alors, le fait d'avoir un enfant gay, sans oublier les mensonges d'hommes homosexuels contaminant leurs partenaires fautes de vouloir se faire tester, les conséquences de la contamination sur l'emploi, le logement, les discours de médecins homophobes, etc.
Face à la vague qui monte, la seule bouée de sauvetage reste la solidarité, l'amitié, le soutien des valides (et parfois, mais rarement, de parents) envers les malades, les prises de conscience d'une avant-garde militante mise à distance des lieux de plaisir et perçue comme particulièrement rébarbative.
Si la série explore cette dimension humaine et communautaire, c'est en s'intéressant à un milieu peu engagé politiquement et associativement (contrairement à "120 battements par minutes" ou à "Pride" par exemple). Le plus étonnant réside peut-être dans la quasi absence de critiques sur la politiques menée par l'Etat pour endiguer l'épidémie.
A voir absolument néanmoins !!!
G